Le minivan quitte l’ile de Penang avec au moins une heure de retard sur ce qui était prévu. Malgré un passage de frontière relativement rapide, nous manquons la correspondance à Hat Yai et devons patienter trois longues heures avant qu’un second van nous emmène jusque Krabi. Durant cette journée de transport, tandis que Chantal a rêvassé tout le long du parcours, j’ai eu largement le temps de regarder trois films sur mon iPad. La nuit est déjà tombée lorsque nous arrivons à destination. Par chance, il reste une chambre dans l’hôtel où nous avons nos habitudes, mais nous ne prendrons possession de «la nôtre» que demain. Ce soir, elle est occupée. Nous laissons les sacs dans la grande que le réceptionniste a accepté de nous louer au même tarif (après discussion tout de même) avant de filer vers le marché de nuit. Nos marchands de beef curry, pour Chantal, et de tom yam, pour moi, nous accueillent avec un plaisir non dissimulé. Les deux assiettes que nous posons quelques minutes plus tard sur une table libre de la place centrale débordent, tellement la femme, si heureuse de nous revoir, nous a bien servis. À quelques pas de là, André et Umawan dégustent des brochettes. Nous nous installons discuter quelques instants en leur compagnie. Lorsque nous repartons, nous avons tous le ventre plein.
De retour à l’hôtel, nous ne nous attardons pas trop et nous couchons après seulement quelques pages de lecture. Nous avons tous les deux l’impression que les longs trajets nous épuisent désormais très vite… Dure réalité!
Le lendemain matin, nous nous rendons visite aux mamies chez lesquelles nous aimons aller prendre le petit-déjeuner. Là encore, nos assiettes contiennent un peu plus de bouillon, de nouilles, de légumes et de poulet que celles des autres clients, pourtant asiatiques. Bref, tout le monde prend bien soin de nous à Krabi.
Ayant trainé du côté du grand marché couvert, puis fait un tour en ville, histoire de retrouver nos repères, nous retournons à l’hôtel pour changer de chambre et y passer les heures les plus chaudes. Pour l’apéritif, André et Umawan nous rejoignent sur la terrasse, accompagnés par un couple d’amis dijonnais comme lui. La bonne humeur règne autour de la table et nous partons manger tous ensemble au marché de nuit.
Nous allons faire quelques courses indispensables, comme du dentifrice et de la crème solaire, le lendemain, dans une supérette du centre-ville. Puis tandis que Chantal continue son tour en ville, je rentre terminer mon récit du séjour malaisien. Deux averses, dont une à n’en plus finir, viennent rafraichir un peu l’atmosphère. Abrités sous nos capuchons, extraits avec difficulté du fin fond de nos sacs pour l’occasion, nous partons manger des fried ricedans un restaurant que nous connaissons bien. Le jeune patron nous reconnait et fait accélérer le service, ce que nous apprécions tout particulièrement. Nous avons, en effet, parfois attendu plus d’une heure nos assiettes dans cette gargote. Mais, ce soir, nous en sommes ressortis le ventre plein moins de 45 minutes plus tard, en ayant savouré de délicieux roti banane, de surcroit! Tout arrive… Nous lui promettons de revenir.
Pour les deux jours suivants, nous louons une moto pour aller à la plage. Le soleil brille de mille feux et il faut en profiter, la météo annonçant une période un peu plus troublée. Pour nous y rendre, nous prenons le chemin des écoliers en empruntant une piste qui serpente au milieu des pics karstiques et des plantations d’hévéas. Nous connaissons par cœur le parcours, pourtant nous n’arrivons pas à nous fatiguer des paysages féériques qu’il traverse. La plage de Tub Kaek reste toujours aussi belle, malgré une affluence plus forte qu’en décembre. Nous étendons les serviettes sur le sable d’une finesse rare, à l’ombre bienfaitrice des arbres à larges feuilles dont j’ignore le nom. Durant nos nombreuses baignades, nous jouons comme des gamins à nous arroser avec une balle qui rebondit sur l’eau. Chantal y trouve prétexte à faire travailler son poignet, encore trop raide à son gout. Entre ces moments d’amusement et le remplissage de grilles de Sudoku et de mots croisés, les heures défilent avec une vitesse impressionnante. Nous aimons bien repartir vers 17 heures, pour pouvoir effectuer le trajet tranquillement, sans trop d’embouteillages.
Les temps ont bien changé depuis notre première venue en Thaïlande, il y a maintenant 20 ans. Les touristes y arrivent désormais en masse et se concentrent pour beaucoup sur le littoral du sud et des iles. Il en résulte bien entendu plein de constructions neuves qui défigurent souvent le paysage. Qui dit nouveaux lieux d’hébergement, dit encore plus de visiteurs, donc plus de véhicules et, par conséquence, plus de difficultés à circuler. Cela devient même problématique du côté d’Ao Nang, d’où partent les bateaux vers les plages inaccessibles autrement. En fin d’après-midi, sur une artère que l’on pourrait un peu comparer à une mini-Croisette, je dois dorénavant slalomer sans cesse entre les bus, les songthaewsqui s’arrêtent tous les dix pas charger encore plus de passagers malgré leur trop-plein évident et tous les autres engins roulants parfois non-identifiés, tout en prenant bien garde aux piétons étrangers qui se croient je ne sais où. Pour une plus grande sécurité, je préfère donc partir un peu plus tôt et ne pas trop subir tous ces inconvénients. En chemin, lorsque nous trouvons un marché de village, nous en profitons pour acheter et dévorer sur place un gros ananas, sucré à souhait et moins cher que sur les étals de Krabi Town. Nous apprécions toujours autant de flâner de stands de nourriture en présentoirs de fruits, de légumes, de poisson, de volaille, au milieu d’un brouhaha indescriptible, mais immanquablement dominé par une sono incroyablement puissante pour des lieux si restreints. Partout, nous ne recueillons que sourires et saluts; ce doit être pour cette raison que nous adorons nous mêler à la population. Parfois, comme aujourd’hui lorsque la circulation ne nous ralentit pas, nous poussons la balade jusqu’au Outlet Village où on peut trouver des articles de marque à prix avantageux. Ce soir, j’achète un ticheurte Adidassans manches noir et vert qui devrait bien aller avec la nouvelle robe que Chantal s’est procurée à George Town, il y a deux semaines. Nous voilà de nouveau bien assortis!
En raison de la fermeture de notre cantine matinale pour quatre jours à l’occasion du Nouvel An chinois et pour changer de notre habituelle soupe bien épicée aux nouilles et au poulet, nous nous faisons plaisir avec un copieux muesli au yaourt et un café honnête dans un petit restaurant en face de l’hôtel. Ici, point de locaux, seulement des touristes de passage. Comme nous fréquentons l’endroit depuis plusieurs années, la patronne nous reconnait aussitôt et vient nous saluer d’un sawadee khaenjoué, le fils, beaucoup plus timide, se contentant seulement de nous servir. Le second matin, à la place du muesli, je veux commander des œufs plats et des toasts, mais me trompe de formule et me retrouve avec deux tranches de pain grillé seulement dans mon assiette, avec un peu de beurre et de confiture. Chantal, devant la sienne débordante de fruits, de graines et de yaourt, rit à n’en plus pouvoir en voyant ma tête. Sitôt sorti, je file directement au marché acheter un ananas pour l’engloutir sans attendre. Me voilà enfin réjoui, moi aussi! Partout en ville, les pétards crépitent. Pour cette nouvelle année qui débute, la mienne, celle du Singe, les Thaïs sacrifient à la tradition en allumant une quantité impressionnante de bandes d’une cinquantaine, voire une centaine, de pétards chacune. Ce vacarme impensable ne cesse pas un seul instant de la journée. Nous avons d’ailleurs été réveillés tôt ce matin; la faute à l’une d’entre elles mise à feu sous notre fenêtre. Mais bon! Nous nous y attendions puisque, tous les ans, la même chose se renouvelle, où que nous soyons en Asie.
Nous retournons aussi au temple qui domine la ville de sa blancheur immaculée. Certes, beaucoup moins beau et moins imposant que celui de Chiang Rai, il n’en demeure pas moins un joli but de promenade. J’aime m’asseoir dans la salle du Bouddha où règne la plupart du temps une température agréable et détailler peintures murales, portes ciselées ou statuettes dorées. Mais, cette fois-ci, pas de réunion de moines en tenue safran comme l’année précédente pour nous amuser photographiquement un peu; nous n’y restons donc pas très longtemps. De retour à l’hôtel, tandis que Chantal termine et envoie deux petits films sur YouTube, je mets quelques photos en ligne et travaille tout l’après-midi sur ce récit de voyage. Pour nous détendre avant d’aller diner, nous prenons une bière sur la terrasse en compagnie de Georges et Claudine, deux Niçois qui passent les hivers de leur retraite à la chaleur des tropiques. Nos critiques enthousiastes les ayant séduits, ils nous accompagnent ensuite au restaurant local pour y savourer de savoureux seafood fried riceet de copieux chicken fried rice. Nos assiettes vides, il restait tout de même une petite place dans nos estomacs pour les banana pancakes que j’apprécie particulièrement ici.
Sur une moto de location, nous partons tôt le lendemain vers Tub Kaek. La balade en cette heure matinale finit de nous réveiller, les zones ombragées que nous traversons ayant encore conservé la fraicheur de la nuit. Lorsque nous arrivons là-bas, la marée bat son plein et submerge complètement l’étroite bande dorée qui fait office de plage. Pour trouver le sable, nous devons nous installer sur l’espace réservé aux clients d’un des hôtels de luxe du coin. Chantal qui a repéré une chaise longue et son matelas sous un large parasol ne reste pas longtemps allongée sur sa serviette, à côté de moi. En plein soleil, je combats la chaleur en me baignant au moins une fois toutes les 30 minutes. Ma femme qui a réussi à dégoter deux immenses draps de bain (!) devant l’une des nombreuses piscines m’en donne un pour que je l’étende sur un transat inoccupé en osier, près de mes affaires. Un peu gêné, je ne résiste pas longtemps à l’appel du confort. Je suis en train de m’installer lorsqu’une serveuse s’approche et offre à chacun de ses clients des fruits enfilés sur un pic en bois. Certainement par erreur, nous en faisons partie! Chantal est pliée de rire, je ne sais plus où me mettre. C’est que nous ne payons pas les 200 euros par jour pour séjourner ici, nous! J’ai honte, mais, bon sang, qu’elle était rafraichissante cette brochette et qu’il est confortable ce transat!.. Comme si de rien n’était, nous repartons en fin d’après-midi pour Krabi Town en traversant tout le palace sans vraiment lever les yeux de nos sandales. Cette journée restera certainement longtemps dans nos souvenirs.
Les Mimi rentrent d’un séjour aux Philippines en début de soirée. Nous les retrouvons, juste au moment de la bière apéritive. Ils nous racontent leurs impressions et leurs petits tourments; ils ont été malades chacun leur tour et ne savent pas ce qui les a abattus à ce point. Mais la fièvre a disparu au bout de quelques jours. Ils recommencent seulement à se sentir à peu près bien. Dans trois jours, ils quittent Krabi pour Koh Lanta avec un copain venu les rejoindre. Tout le monde croise des doigts…