Deux couples d’Allemands quadras nous encadrent désormais. Quand je leur souhaite la bienvenue, l’un des hommes remarque le maillot du PSG que je porte et m’apprend qu’il supporte le Bayern de Munich. Alors que nous plaisantons, son collègue enchaine de façon mesquine et méchante sur l’équipe parisienne. Abasourdi par cette haine aussi démesurée qu’inattendue, je balbutie quelques banalités avant de m’enfermer dans ma chambre. Voilà un voisinage qui débute bien curieusement ! Heureusement, une fois l’épisode oublié au bout de quelques jours, nos relations deviennent plus conformes à la bienséance. Nous trinquons même ensemble à l’occasion de Noël !
Les journées passent à une vitesse folle entre la balade du matin et celle du soir le long de la plage, les grilles de mots fléchés et de sudoku, les baignades et les parties de raquettes. Les fêtes approchent et nous devons déménager la réceptionniste nous ayant avertis dès notre arrivée que l’hôtel était complet pour la fin de l’année et le début de la nouvelle. Prévoyante, Chantal a cherché, trouvé et réservé une chambre dans une guesthouse familiale toute proche à un prix défiant toute concurrence, surtout durant la haute saison. Nous emménageons donc le 20 décembre dans notre nouvelle crèche d’un vert à faire pâlir de jalousie la plus belle des pommes Granny Smith ! Avant d’aller diner et pour fêter notre arrivée, nous prenons une Changtout juste sortie du frigo en compagnie d’un jeune couple de Brésiliens et d’un Argentin bien sympathiques, nos nouveaux voisins. Eux aussi me parlent de mon maillot, mais de manière beaucoup plus cordiale et amusante que celle de l’Allemand de l’autre jour. Me voilà de bonne humeur !
Pour le réveillon de Noël, nous arrivons les mains dans les poches devant le Baifern qui, à notre grande surprise, affiche complet et n’accepte plus personne ! Misant sur notre très probable venue, les patrons nous ont réservé une petite table à l’écart du groupe de Suédois qui occupe tout le reste de la salle. La chance pour les imprévoyants que nous sommes ! Après un cocktail de jus de fruits, nous savourons un généreux phat thai pour Chantal et un non moins copieux massaman au thon pour moi. Comme si nous n’en avions pas assez, la jeune patronne, ou plutôt celle qui le deviendra bientôt, Baifern nous offre un poulet aux noix de cajou, aussi bien servi que nos plats précédents. Lorsque nous quittons la table, toutes les assiettes sont vides et les ventres bien rebondis ! Au moment de régler la note, Baifern nous pose des cornes d’élan avec des grelots sur la tête ce qui la fait bien rire. Nous voilà donc dans la rue principale, puis sur la plage, à déambuler avec un truc qui attire tous les regards sur nous. Après un essai infructueux à l’Indian Bar bondé où Pas, le Thaï au bandeau d’Apache, surprend ses clients avec un spectaculaire show de poi fire, la chance nous sourit lorsqu’une table se libère à la terrasse d’un autre bar juste à notre arrivée. Les pieds dans le sable, nous sirotons tranquillement quelques Chang en regardant les gens défiler sur la plage et les enfants s’amuser avec des épées ou des volants lumineux. Un artiste nous divertit avec un spectacle de feu, joli certes, mais nettement moins impressionnant que celui de Pas. Minuit vient de sonner lorsque nous rentrons dans notre chambre et ôtons nos cornes d’élan ; nous les avons portées jusque là !
À Koh Lanta, il n’y a pas de cheminée dans les maisons :
le Père Noël n’a donc pas pu venir !
Tant pis pour nous…
Pour casser un peu le rythme plage-resto-dodo, nous louons une moto une fois par semaine pour sillonner l’ile. Habituellement, nous filons vers Old Town en début de matinée pour y arriver vers 9 h 30, heure idéale pour la photo. Inondée d’une belle lumière dorée, la petite ville offre alors de jolies perspectives sur les maisons à pilotis et les bateaux. En général, je m’y amuse pas mal. Nous y prenons aussi souvent un smoothie à la mangue ou à la banane. Nous poursuivons la promenade vers les villages des gitans de la mer où nous nous arrêtons comme à chaque fois avant de revenir sur nos pas et traverser l’ile par la seule route possible. Nous redescendons ensuite de l’autre côté jusqu’au parc national qui occupe la pointe sud. Tout le long du trajet, de magnifiques criques n’attendent que nous et les longs bains qu’on y prend nous rafraîchissent agréablement. Nous effectuons ainsi plusieurs stops tout au long de la journée et assistons au coucher de soleil depuis la plage Phra Ae. Après une telle journée, nous nous endormons très vite ; pas besoin de berceuse !
Pour le Nouvel An, nous avons fait faux-bond à André le Québécois et Soï, sa femme qui nous avaient invités à partager leur réveillon. Mais les amis qui devaient nous rejoindre ont raté leur bus et sont en fait restés à Krabi. Peu importe, nous retournons au Baifern et, au contraire de Noël, sommes pratiquement les uniques clients. Seul, un couple occupe la salle avec nous. Les restaurants autour ne sont pas mieux lotis ; ce soir, les touristes n’ont en effet pas quitté leurs hôtels qui ont tous organisé une fête à l’occasion du passage à la nouvelle année. En cette St-Sylvestre 2017, nous nous accordons un verre de vin blanc en guise d’apéritif. Bien frais, il ravit nos papilles et nous égaye un peu : c’est qu’on avait perdu l’habitude depuis notre séjour estival en Bretagne ! Comme la semaine passée, nous retournons sur la plage prendre quelques verres et assister à l’envol de centaines de lanternes dans l’obscurité de la nuit. Nous aussi avons amené la nôtre, mais un coup de vent malencontreux l’a enflammée avant le décollage. À minuit précis, le départ des feux d’artifice évacue très vite notre déception. De tous les côtés les fusées illuminent le ciel, chaque hôtel tirant les siennes. Sur les deux kilomètres du rivage, l’effet est saisissant malgré une sophistication pyrotechnique bien plus rudimentaire que celle de chez nous. Tout le monde se souhaite une bonne année et une ambiance joyeuse règne dans les bars. Quelques rares personnes dansent sous les lampions, tandis que la plupart restent discuter assis autour des tables. Nous regagnons tranquillement nos pénates vers 1 h 30 alors que la plage se vide.
L’année 2018 commence plutôt bien…