Un premier avion décolle à 20h20 de Singapour pour Jakarta. Là, nous changeons d’appareil pour nous envoler vers Makassar d’où nous repartons pour un dernier vol vers Ambon, la ville principale des iles Moluques à l’Est de l’Indonésie. Il est un peu plus de 6 heures lorsque nous atterrissons. Nous n’avons pas fermé l’œil. Après une quinzaine de séjours dans ce pays, c’est la première fois que nous y posons les sacs. Le professionnalisme et la rigueur des Singapouriens ont laissé place à la nonchalance et l’à-peu-près des Indonésiens, choses que nous avions presque oubliées. Le choc est rude ! Nous attendons les bagages une heure durant. Tandis que le gars qui déchargeait l’avion devait être seul vu l’espacement avec lequel les valises parviennent devant leurs propriétaires, une armée de porteurs regarde défiler un à un les bagages sur un tapis roulant lui-même d’une lenteur incroyable. Les nôtres se suivent pratiquement… mais avec dix minutes d’écart. Au fil de nos visites dans ce pays, j’ai appris à rester zen. Lorsque nous sortons de l’aéroport, je ne suis même pas énervé. Je me rends compte des progrès réalisés. Une petite contrariété vient cependant troubler cette sérénité : il pleut. Pas l’averse tropicale ! Non, plutôt la pluie bien de chez nous sous un ciel complètement bouché ! Oui, mais… il fait plus de 30° !
Nous allons passer quelques jours ici. Aussi, vu la météo assez maussade, nous choisissons un hôtel supérieur à ceux où nous séjournons d’habitude. Jolie chambre, grand lit, belle salle de bains, clim, télé et surtout un wifi excellent font largement passer l’addition. Le soleil a raison des nuages dans le milieu de l’après-midi. Aussi sortons-nous de notre retraite pour chercher un endroit où diner. Après maintes hésitations, nous optons pour un stand de rue tenu par une famille musulmane, juste en face d’une mosquée. Le jeune homme prépare avec entrain ce que nous lui désignons parmi toutes les choses appétissantes étalées sur son présentoir : un poulet bakar pour Chantal et un poisson mariné avec des légumes pour moi, le tout accompagné de riz. Pour 3,20 €, nous en repartons repus. Sur le chemin du retour, je m’arrête dans une boutique de téléphonie pour acheter une carte Sim locale. Pour quelques euros, ça pourra toujours nous dépanner. Trois jeunes filles voilées et rigolotes qui s’occupent de moi ne parlent pas anglais. Qu’à cela ne tienne : le traducteur Google, et tous les fous rires qui vont avec, vient à notre rescousse. Je profite aussi d’être là pour changer le film protecteur bien rayé de mon mobile. Je m’en tire pour une note globale de 6,50 €. Difficile de faire mieux !
Après la nuit blanche d’hier, nous tombons littéralement de fatigue. Lorsque nous nous réveillons le lendemain, aucun de nous deux n’a le souvenir de s´être couché !
Le nasi goreng du petit-déjeuner et le bon café qui l’accompagnait avalés, nous partons pour le marché situé, en partie, sur les quais du port. Là-bas, tout le monde nous sourit, nous salue ou vient nous serrer chaleureusement la main et se prendre en selfie en notre compagnie pour les plus braves. Cela nous rappelle l’ambiance du Bali d’il y a 20 ans, celui que le tourisme de masse et Instagram n’avaient pas encore assassiné. J’espère de tout cœur que, ici, ils sauront résister. Mais ça, c’est une tout autre histoire… Du point de vue de l’accueil, celui que nous avaient réservé les Iraniens reste toujours inégalé, mais celui des Indonésiens des Moluques fera un excellent dauphin. Et certainement pour un bon moment lui aussi. Bref, nous sommes arrêtés tous les dix pas. Nous communiquons par geste et par les quelques mots de leur langue que nous connaissons. Ce qui nous fait tous bien rire ! Après ce tour bien sympathique, nous retournons à l’hôtel nous abriter de la chaleur étouffante. Nous avons bien fait. Quelques instants plus tard, l’orage éclate et déverse des trombes d’eau sur Ambon. Nous l’avons échappé belle !
J’en profite pour commencer la rédaction du journal sur notre séjour à Singapour. Cela fait désormais plusieurs mois que je n’ai pas repris la plume et coucher les mots sur le papier, virtuel en ce qui me concerne, me donne encore plus de fil à retordre que d’ordinaire. Je mets un temps fou à poser à peu près correctement les deux premières phrases. À cette allure-là, je ne suis pas tiré d’affaire ! En fait, je ne le sais pas à ce moment, je vais passer les trois jours suivants, plus une nuit jusqu’à 5 heures, à écrire puis mettre en ligne les deux articles et une galerie sur cette ville. Par contre, je m’accorderai toujours la petite balade du matin, au marché ou ailleurs, et celle du soir pour aller diner. Nous avons dégoté un autre restaurant où le patron nous laisse boire tranquillement les Bintang que nous avons achetées au préalable dans une supérette. Je trouve mon mee kuah excellent et Chantal apprécie tout autant ses satay à la sauce cacahuète. Nous n’avons pas oublié la petite famille sur le trottoir près de la mosquée. Nous y avons repris un diner tout aussi bon que le premier, mais lorsque, la troisième fois, nous y arrivons avec nos bières, le jeune homme nous explique très gentiment qu’en face l’édifice religieux, il ne nous est pas possible de consommer d’alcool. Nous comprenons très bien ; lui également quand il nous voit passer notre chemin. Pris de court, nous tombons un peu plus loin sur une boulangerie locale qui nous accepte avec nos boissons. Du coup, nous y achetons quelques excellentes petites choses à grignoter pour le grand plaisir de la patronne et des personnes présentes…
Le matin suivant, nous nous rendons au bureau de la compagnie maritime Pelni réserver nos places pour les iles Banda. Il y a foule au comptoir, mais un monsieur s’approche et nous dirige avant tout le monde vers l’un des guichets, certainement celui où la personne derrière parle quelques mots d’anglais. En effet, une charmante jeune fille nous vend deux tickets et nous explique le jour, l’heure et l’endroit où embarquer. Lorsque nous repartons, la queue est encore plus longue, mais les gens peu rancuniers nous saluent tous avec un sourire qu’on croirait greffé à vie sur leur visage. Nous en sommes presque gênés.
Une fête militaire se déroule tout près de là. Sur un podium, un bon groupe de rock fait se déchaîner une armée de bidasses en treillis qui sautillent en rythme, les bras en l’air. Les gradés se tiennent à l’écart et, nous apercevant derrière la grille, nous adressent de grands signes en rigolant. Nous leur répondons de la même manière. Nous retournons encore sur le marché et nous réfugions sous la partie couverte pour échapper à une courte ondée. J’y négocie un maillot du PSG pour 1,60 €. Je n’ai jamais trouvé celui du Stade Rennais où que ce soit dans le monde, hormis en France ! Tant pis pour moi, mais je suis sûr que je ferai grand plaisir à un gamin, un jour, quelque part, quand je le lui donnerai…
Le jour du départ pour les iles Banda arrive…
Mais comme nous n’embarquons que le soir, nous restons dans la salle de restaurant attenante à l’hôtel toute la journée. Nous en sortons juste pour aller diner en ville chez le petit papy qui nous accepte avec nos bières. En fin de soirée, le réceptionniste appelle un taxi. Après avoir empilé les sacs comme il a pu dans son coffre trop étroit, le chauffeur nous dépose quelques instants plus tard juste devant le ferry.